Une amie qui vous veut du bien. - Unaëlle & Roman

Princess effleura d’un index la surface froide de son bureau de verre.
L’infrastructure, qu’elle aimait à considérer comme son Quartier Général, avait tout de l’entrepôt froid et impersonnel. Comme le trafic qui s’y jouait d’ailleurs. Un vaste entrepôt métallique, rempli de curieux conteners à demi-translucides où sanglotaient des Faunus en attente d’être délivrés à leurs acheteurs. Dans les allées, des hommes de main lourdement armés dont la criminelle avait su s’acheter la loyauté.
La rose se souvenait encore de sa première capture. Elle avait 26 ans, guère plus. En colère contre la race qui lui avait une fois de plus dérobé un être cher, elle s’était mise en tête de faire souffrir ses membres autant qu’elle-même avait souffert. Une partie d’elle-même susurrait de ne pas mettre tout le monde dans le même panier, lui murmurait de penser à Rogus, à ses amis, mais … la raison de la jeune adulte qu’elle était devenue avait chancelée. Transpercée par la haine. Elle était tombée du mauvais côté, celui où il n’y a plus de retour possible. La mort ne suffisait pas, ne suffisait plus. Il fallait leur infliger pire encore que la mort : une vie privée de liberté. Alors, Unaëlle avait monté un piège, et une jeune adolescente Faunus était tombée dans ses filets. Elle l’avait ramenée chez elle, toujours prisonnière, et s’était occupée d’elle jusqu’à pouvoir la revendre en esclavage à la Schnee Dust Company.
Et puis, la famille Schnee s’était révélée de plus en plus friande de la main d’œuvre bon marché que pouvait fournir Unaëlle. L’argent affluant, le trafic avait été florissant. La belle avait pris le nom de Princess, s’était établie dans ce sobre entrepôt et avait recruté une équipe grassement rémunérée pour l’assister dans la capture et la garde des Faunus qu’ils repéraient.
Depuis quelques temps, Princess ne se préoccupait presque plus des rafles, laissant la main à d’autres Chasseurs et Chasseresses renégats qui règleraient la question bien plus facilement qu’elle. Elle demeurait là, dans son bureau surélevé aux murs et mobilier de verre, à superviser les opérations et assurer la gestion administrative et commerciale de l’organisation. Enfouissant doucement les sursauts de son humanité sous une impersonnelle comptabilité.
Unaëlle avait toujours été une jeune femme très méticuleuse. Princess était devenue un monstre d’efficacité.

Rapidement, elle s’était imposée en monopole à Mistral, s’enrichissant à vitesse grand V. Son train de vie avait évolué : l’ex-Chasseresse évoluait désormais parmi les hautes sphères de la société, parée d’atours à l’élégance incomparable. Le visage de Princess méconnu du grand public, elle n’était qu’une criminelle de plus dont on évoquait le nom sans se douter qu’il s’agissait de cette jeune femme à la robe somptueuse qui buvait du champagne juste à côté de vous.
Sa chevelure rosée voletant toujours autour de son visage, la puissante criminelle envisageait désormais de conquérir le reste de Remnant. A commencer par Vale.
Pour ce faire, un seul nom avait su tirer son épingle du lot. Le nom de celui qui avait su utiliser et asservir les White Fang. Princess eut un sourire cruel. Lui la comprendrait, saurait lui indiquer le moyen de s’insinuer efficacement à Vale, d’y développer sa clientèle sans attirer la suspicion. Et il se trouvait, par chance, qu’un des informateurs de la jeune femme disposait de son contact.
Fixant le scroll déroulé devant elle sur le bureau, Princess écouta les longues tonalités qui la séparaient de son interlocuteur. Le cœur battant, une légère appréhension mêlée à l’excitation de ce qu’elle était sur le point d’accomplir.
Il décrocha enfin.
« Bonsoir, Roman. »
La criminelle eut un sourire pour elle-même.
« Je ne te dérange pas, j’espère ? »